Black magic à Bali



« Si ce n’est pas indiscret, Ketut, comment tes parents sont-ils décédés ? Ils étaient jeunes quand même !
- Black magic.
- Quoi, pas tous les deux quand même ?
- Si, tous les deux.
- Non ?!
- Si, c’est fréquent à la campagne. En ville ça se perd, heureusement !
- Et qui aurait fait ça ? Vous le savez ?
- Oui, on sait. Des voisins qui avaient invité mes parents. Ils avaient l’air très gentils comme ça.
- Et pourquoi auraient-ils fait cela ?
- Jalousie. Souvent les orang kampung n’aiment pas qu’on réussisse mieux qu’eux. Or, nous, on avait une belle maison, une voiture et, en gros, tout ce qu’il fallait, alors hop !
- Rho, et donc ?! Ils les ont empoisonnés ?
- Non, ce n’était pas du poison, c’était… »
S’ensuit un galimatias. Je saisis que les voisins ont invité les parents de Ketut dans une pièce où se trouvaient des esprits maléfiques. J’évite d’insister lourdement, je reposerai peut-être des questions une autre fois : les Balinais ne sont pas du genre à faire les gros yeux si on n’a pas bien compris du premier coup ! Et quelle preuve qu’il s’agit bien de magie noire ? Surtout que la mort a été loin d’être immédiate ! Le docteur n’a pas su faire de diagnostic, à part que c’était le foie qui avait été visé dans les deux cas. Mais le dukun, lui, a été formel : black magic ! En tout cas, ça donne des frissons : se faire inviter par des voisins tout sourire et ressortir les pieds devant ?!
Pareil, mon esthéticienne, Kadek, avait également prononcé le mot redoutable de sorcellerie quand je lui ai demandé comment sa grande soeur était morte encore tout nourrisson. Inutile de demander si la cause pourrait être une hygiène défectueuse même si j’ai, parfois, vu des scènes que je me retiendrai de décrire pour ne pas donner des haut-le-cœur à nos lecteurs de la Gazette. De toute façon, le dukun il a dit, alors….

Je soupçonne avoir été moi-même victime d’un p’tit coup de black magic il y a quelques années après avoir découvert un mois de décembre, juste avant de partir pour la France, que mon homme de ménage, Wayan, picorait dans mon portefeuille, sans doute pour assouvir sa passion des combats de coq. Nous l’avons donc viré (il a fallu le menacer d’acheter un flic pour contrer sa menace de faire intervenir un ami à lui soi-disant terriblement influent). Bref, une semaine après mon arrivée en France, la peau de mon visage a brûlé puis est partie en lambeaux si bien qu’entre Noël et le Jour de l’An je ressemblais moins à la Mère Noël qu’à un Croquemitaine auquel les enfants n’avaient pas follement envie de faire des bisous. Certes, le choc thermique Bali-Paris est une explication valable mais c’est quand même la seule fois que ça m’est arrivé en dix ans ! Et puis je me suis souvenue de ces fois où Wayan me disait en me regardant droit dans les yeux, tout en n’en finissant pas de sécher une assiette déjà sèche, que les Balinais étaient très férus de magie noire mais que lui n’était pas comme ça, bien entendu… Bref, qui sait ? Enfin, d’autres expats trouveront que mon histoire est de la gnognotte et, si on les branche sur le sujet, ils ont des récits autrement plus croustillants à raconter avec des pustules et des vers qui sortent de plaies béantes sur des corps vivants… En général, les victimes sont des Indonésiens puisqu’il faut y croire au moins un peu pour que ça marche, parait-il !
Eh oui, les vieux expats du Bali d’Avant vous le confirmeront : on n’est pas vraiment immergés dans la culture indonésienne tant qu’on n’a pas quelques anecdotes de black magic en stock pour les longues soirées de saison des pluies !

Nancy Causse Yogya, dite Papaya
La réponse de Miss O…

Bonjour Simon, je suis un peu surprise de la virulence de votre commentaire. Pourquoi m'attaquer personnellement au lieu d'attaquer ce que j'ai écrit ? Effectivement beaucoup d'expats ont de petits moyens - j'en fait d'ailleurs partie - mais d'une manière générale, nous sommes quand même plus aisés que les Indonésiens. Je conseille dans ce texte d'éviter justement les signes d'opulence... quand à la mention du garde du corps c’est une simple boutade destinée à mettre un peu d'humour - et à me moquer gentiment au passage de ceux d'entre nous qui ont les moyens d'en avoir - dans un état de fait bien triste... et bien préoccupant. J'ai eu beaucoup de chance de ne pas avoir été blessée contrairement à certaines de mes amies / connaissances qui, elles, l'ont été, et assez grièvement... Pour moi, plaie d'argent n'est pas mortelle... Cordialement.

Miss O
Un commentaire de lecteur sur le billet de Miss O du mois dernier, au sujet d’un vol de sac à main.

Villa, voiture, garde du corps, nounou, i phone. Savez vous qu'il y a aussi à Bali des expatriés qui ont de très petits moyens ? Votre article ressemble à une pleurnicherie de petite bourgeoise fêtarde... Le vol est toujours condamnable mais il est idiot d'afficher son opulence dans un pays pauvre. Si vous adorez tant « votre île », pourquoi n'essayez vous pas de vivre comme la majorité de ses habitants ?

Simon

motard dans la cendre

motard dans la cendre
merapi novembre 2010

face sud du merapi

face sud du merapi
paysage de désolation après le passage des lahar